23. April 2024
Réponse à la question parlementaire de notre députée Joëlle Welfring à Monsieur le Ministre de l’Environnement, du Climat et de la Biodiversité concernant les risques environnementaux des nouveaux OGM.
En juillet 2023, la Commission européenne a proposé un nouveau cadre pour la règlementation les « nouveaux OGM », donc les plantes produites par les nouvelles techniques génomiques. La proposition considère une catégorie de nouveaux OGM (dite de catégorie « NGT1 ») équivalente aux plantes dites conventionnelles sur base du type et du nombre de mutations introduites. Selon le texte, cette catégorie des OGM ne devra plus passer par une analyse des risques pour l’environnement et pour la santé.
Le gouvernement luxembourgeois s’est prononcé en faveur d’une dérèglementation des nouveaux OGM, estimant que les plantes issues des nouvelles techniques génomiques NGT1 pourraient être produites naturellement, et devraient donc être considérées « équivalentes » à des plantes conventionnelles et ne devraient donc plus faire l’objet d’une analyse des risques pour l’environnement et la santé et ne devraient plus être traçables ni étiquetées.
Pourtant, la proposition de règlement est controversée, plusieurs agences étatiques européennes ainsi qu’organisations environnementales ayant sonné l’alerte par rapport aux effets que le proposé règlement risque d’avoir, notamment sur l’environnement naturel.
Ainsi, dans un premier avis[1] de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail de la France (Anses) datant de novembre 2023, son groupe d’expert.e.s conclut que les critères d’équivalence basés uniquement sur les aspects moléculaires sont insuffisamment justifiés et devraient prendre en compte les caractères des plantes et leurs éventuels risques.
Dans un deuxième avis[2] publié en mars 2024, le groupe d’expert.e.s de l’Anses considère que l’évaluation des risques pour l’environnement telle que demandée par le référentiel existant pour les OGM classiques reste pertinente pour les plantes issues de mutagénèse dirigée. De plus, le groupe estime que « […] cette évaluation des risques pour l’environnement devrait prendre en compte les potentiels effets cumulés sur l’environnement à long terme liés à une augmentation des surfaces de culture de plantes génétiquement modifiées autorisées, ainsi que les caractéristiques agro-environnementales de leur culture. »
Il préconise la mise en place d’une évaluation des risques ex ante prenant à la fois en compte la technique utilisée et les caractéristiques de la plante, et souligne l’importance de mettre en place un mécanisme global de suivi de la mise en œuvre des nouveaux OGM après leur mise sur le marché, y inclus sur le plan environnemental.
Le Bundesamt für Naturschutz de l’Allemagne quant à lui a également publié une étude scientifique basée sur la proposition de la Commission européenne. L’étude conclue que certaines plantes NGT1 peuvent présenter des risques environnementaux similaires par rapport aux OGM classiques, notamment en ce qui concerne leur caractère invasif.
La Gesellschaft für Ökologie in Deutschland, Österreich und der Schweiz (GfÖ) dans son analyse[3] met en garde que la dérèglementation proposée s’appliquera à toutes les plantes, y inclus les espèces sauvages. Elle estime que l’application illimitée du NGT1 dans les populations sauvages aura des conséquences imprévisibles sur la biodiversité et la conservation de la nature. La GfÖ recommande une évaluation des risques appropriée de tous les nouveaux OGM, en application du principe de précaution.
Dans ce contexte, je me permets de poser les questions suivantes :
[1] Avis de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail relatif à l’analyse scientifique de la proposition de règlement de la Commission européenne du 5 juillet 2023 relative aux nouvelles techniques génomiques (NTG) – Examen des critères d’équivalence proposés pour définir les plantes NTG de catégorie 1, URL : https://www.anses.fr/fr/system/files/BIOT2023AUTO0189.pdf
[2] Avis et rapport de l’Anses relatif aux méthodes d’évaluation des risques sanitaires et environnementaux et des enjeux socio-économiques associés aux plantes obtenues au moyen de certaines nouvelles techniques génomiques (NTG), URL : https://www.anses.fr/fr/system/files/BIORISK2021SA0019Ra.pdf
[3] Expert Group “New Genomic Techniques”, Ecological Society of Germany, Austria and Switzerland (GFÖ), New genomic techniques from an ecological and environmental perspective: science-based contributions to the proposed regulations by the EU Commission, URL : https://gfoe.org/sites/default/files/ngt_gfoe_final.pdf